Les vaccins sont-ils vraiment utiles ?

En bref :

Que penser des vaccins contre le Covid ? Faut-il se faire vacciner, comme y pousse le gouvernement ? Faut-il se méfier, au moins attendre de voir s’ils fonctionnent vraiment ? Et les chiffres qu’on entend, nouvelle hausse des contaminations au Royaume-Uni, au Portugal, en Israël, alors que plein de monde y est vacciné, comment faut-il les comprendre exactement ? La vaccination progresse dans le monde, de plus en plus de pays lèvent leurs restrictions sanitaires, et pourtant, d’autres voient les courbes des contaminations repartir à la hausse. Comme il est difficile de bien tout démêler, on a fouillé le sujet avec un petit groupe d’abonnés. 

Qui en parle le plus ? Selon nos robots, le sujet est très discuté du côté de la droite conservatrice, y compris le Parti chrétien démocrate, ainsi que de La France Insoumise. 

Pourquoi c’est intéressant ? Qu’on soit pour l’obligation généralisée ou totalement contre la moindre vaccination, le sujet soulève tellement de passions qu’il est difficile d’y réfléchir la tête froide. Pourtant, la complexité et la multiplicité des chiffres disponibles demandent des analyses minutieuses. 

Les faits

– Au Royaume-Uni et en Israël, pays «parmi les plus avancés au monde en matière vaccinale», la reprise épidémique due au variant Delta interroge de nombreux internautes sur l’efficacité du vaccin. 

– Les deux pays ont des taux de vaccination élevés, avec près de 60% des adultes totalement vaccinés. Mais selon l’ancien directeur général du ministère israélien de la Santé, «40 % des nouveaux cas sont des personnes vaccinées, ce qui signifie que le variant est très contagieux». 

– Apparu en Inde au mois de mars (voir ce Newskit), le variant Delta est 40 à 60% plus contagieux que le variant Alpha (britannique) lui même 38 à 50% plus contagieux que la souche originelle. Selon Public Health Scotland et Public Health England, il doublerait le risque d’hospitalisation, donc de formes graves de la maladie. Le médecin et chercheur Nathan Peiffer-Smadja résume la situation dans ce thread.

🤔 Les vaccins protègent-ils vraiment ? Ça dépend de la maladie et du type de traitement. Le vaccin contre l’hépatite B, par exemple, procure entre 98% et 100 % de protection, tandis que celui contre la grippe est efficace entre 60 et 70% chez le jeune adulte. Dans le cas du Covid-19, aucun vaccin ne présente une efficacité de 100%. Il est donc possible, même en étant vacciné, d’être contaminé par le Covid-19. 

💉 Quel est le but du vaccin contre le Covid ?

– Le principal objectif est d’éviter, pour les personnes infectées, de déclarer une forme grave du virus qui nécessiterait une hospitalisation et pourrait entraîner le décès. Face à la souche originelle du Covid-19, les deux vaccins à ARN messager (Pfizer/BioNTech et Moderna) présentent une efficacité respective de 95% et 94,1% dans la prévention des formes graves. Le vaccin Pfizer protège à 97% contre les hospitalisations et à 96,7% contre les décès.

– Selon un rapport du Scientific Advisory Group for Emergencies (SAGE) le 9 juin, deux doses d’AstraZeneca confèrent une efficacité de 55% à 71% pour prévenir une infection, 90% pour prévenir une hospitalisation et 96% pour prévenir un décès. 

– L’autre mission du vaccin est de réduire le risque d’être infecté par le Covid-19 et de le transmettre. Cela permet de limiter la circulation de la maladie dans la population. C’est ici qu’intervient l’enjeu de l’immunité collective. Plusieurs études menées au Royaume-Uni et en Israël ont démontré qu’une personne vaccinée et infectée avait seulement 10% de risque de transmettre le virus. 

– Le seuil de la population à vacciner pour empêcher la circulation d’un virus dépend de la vitesse de propagation de ce dernier (donc de sa contagiosité) : plus elle est rapide, plus le seuil augmente. Pour la souche originelle du Covid-19, le seuil est estimé entre 60 et 70%, mais pour le variant Delta, il grimpe à 90%.  

🦠 Et ça marche contre les variants ? Ça dépend. Contre le Delta, selon les études britanniques, l’efficacité du vaccin Pfizer pour éviter les symptômes s’établit à 80%, celle d’AstraZeneca tombe à 60%. En revanche, contre les hospitalisations, ces deux vaccins conservent un haut niveau de protection, respectivement de 96% et 92%.

– Face au variant Delta, une seule dose ne procure qu’une protection limitée. Avec le vaccin Pfizer, la réponse immunitaire est évaluée à 32%, contre 50% face au variant Alpha (britannique) et 79% face à la souche originelle. Une seule dose du vaccin AstraZeneca n’est pas ou peu efficace. 

🇬🇧 L’exemple anglais est-il inquiétant ? Sur les 117 décès dus au variant Delta au Royaume-Uni, 70 personnes avaient reçu au moins une dose de vaccin, dont 50 étaient totalement vaccinés (42,7% des décès), rapporte Le Figaro. Inquiétant ?  

– Pas forcément : le scientifique Tom Buyaert explique que le fait que 60% des décès concernent des personnes vaccinées ne prouve pas que les vaccins sont inefficaces, puisque «plus il y a de personnes vaccinées dans la population, plus le nombre de décès parmi la population vaccinée sera haut». 

– En tenant compte de l’efficacité des vaccins dans la prévention des décès et du taux de mortalité du virus dans une certaine population (ici une efficacité de 95% et un taux de mortalité de 10% chez les plus de 80 ans), à nombre égal de personnes vaccinées et non-vaccinées, le nombre de décès est bien plus important chez les non-vaccinées, d’où la volonté des autorités d’atteindre une vaccination de masse. 

– Le cas du Royaume-Uni révèle finalement le nombre relativement faible de décès quotidiens, par rapport aux nombre de contaminations quotidiennes : au 28 juin, le rapport était de 17 décès pour 16 400 nouveaux cas, soit 1 décès pour 965 cas. C’est bien moins qu’au début de la deuxième vague, où le Royaume-Uni recensait 100 décès pour 6 270 nouveaux cas (au 15 octobre), soit 1 décès pour 63 cas. Par ailleurs, une étude de Public Health England et de l’université de Cambridge estime à 27 000 le nombre de vies sauvées grâce à la vaccination.

– Contrairement aux précédentes vagues, au Royaume-Uni ou en Israël, l’évolution des courbes des décès et des hospitalisations ne suivent pas celle des nouvelles contaminations, signe de l’immunité d’une partie de la population. 

– Une autre étude de Public Health England montre que sur les 60 624 cas anglais contaminés par le variant Delta entre le 1er février et le 14 juin, 58,5% n’étaient pas vaccinés. En revanche, 6,7% de la population totalement vaccinée a contracté le Delta. 

❓ Donc quel est le risque de la 4e vague, exactement ? 

– Le 5 juillet, Olivier Véran a averti sur le risque d’une nouvelle vague dès la fin juillet en France. Les scientifiques Jean-François Delfraissy et Arnaud Fontanet ont le même diagnostic. L’Institut Pasteur projette quant à lui «un pic d’hospitalisation» à l’automne 2021 si la population n’est pas assez vaccinée. Le ministre de la santé a qualifié le besoin de vaccination de «course contre la montre», car celle-ci fait «chuter le risque de forme grave, y compris avec le variant Delta».

– Le président de l’OMS Hans Kluge a lui aussi évoqué «une nouvelle vague dans la région européenne» :  le nombre de cas en Europe est reparti à la hausse après 10 semaines de baisse constante. 

– Le président du Conseil scientifique, Jean-François Delfraissy, a toutefois modéré ses prévisions en précisant que cette quatrième vague sera «beaucoup plus nuancée que les trois précédentes» grâce à la vaccination. L’Institut Pasteur tempère également, en affirmant que «l’effort nécessaire pour contrôler un rebond épidémique devrait être nettement moindre que pendant la période pré-vaccinale», tout comme le médecin urgentiste Gérald Kierzek qui estime que si «quatrième vague» il y a, elle ne devrait pas ressembler aux trois autres que la France a connu.

[Modification 09.07.21 : ajout d’éléments concernant le variant Delta dans le troisième paragraphe des faits]

[Modification 15.07.21 : correction concernant la contagiosité du variant Delta]

Ce kit a été écrit avec la participation des abonnées de Flint Zina, Maxime, Félix Beaulieu et Kédem Ferré.

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