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Peut-on dire que « rien n’est fait » sur le climat ?

Peut-on dire que « rien n’est fait » sur le climat ?

S’indigner de l’insuffisance de réaction des gouvernements et entreprises face aux recommandations du GIEC (le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) contre le dérèglement climatique, tout comme du « greenwashing », est légitime. Mais peut-on dire que « rien n’est fait »? Dans ce billet, le chercheur François Gemenne, membre du GIEC, appelle à la nuance et à dépasser le « stade de l’alerte » pour ne pas sombrer dans un défaitisme qui freinerait l’action.

Je sais que les émissions mondiales de gaz à effet de serre continuent à grimper, mais je suis toujours étonné de cette propension à penser que rien n’est fait, qu’aucune alerte n’a fonctionné, que rien ne bouge. Je crois que c’est assez décourageant, et donc assez délétère…

En Europe et aux États-Unis, là où l’activisme est le plus radical, les émissions sont en baisse depuis plusieurs années. Ce n’est pas suffisant ni assez rapide, mais on ne peut pas dire non plus que rien n’est fait.

En France comme partout en Europe, le changement climatique est désormais un sujet majeur de préoccupation des gens. Il me semble que le stade de l’alerte est dépassé depuis longtemps, et qu’il s’agit maintenant de mettre la société en mouvement.

Il reste bien sûr d’énormes besoins de formation. Mais je vois de plus en plus d’entreprises et de collectivités se former avec des outils comme la @FresqueDuClimat. Je vois les formations dans les médias, les cours dans les universités et grandes écoles.

Certaines mobilisations ‘classiques’ fonctionnent : le retrait de la France du Traité sur la Charte de l’Energie est un pas en avant, et doit beaucoup au travail de mobilisation de @ysaheb, @MaximCombes, @CamilleEtienne_ et d’autres.

Je ne veux pas minorer la gravité ni l’urgence de la situation. Mais si l’on veut avancer, ne faut-il pas aussi encourager les minorités qui vont de l’avant ? Dire que rien ne marche, qu’aucune alerte n’est entendue, c’est factuellement inexact. Et délétère, je crois.

PS : la maison brûle. Tout le monde le réalise bien, et le climat lui-même se charge de le rappeler. Il me semble que ça ne sert plus à grand-chose de crier au feu – fût-ce avec de la soupe ou de la purée – et qu’il faut maintenant chercher à éteindre l’incendie…

Cet article est tiré d’une discussion publiée sur Twitter, que vous pouvez retrouver ici.

François Gemenne est chercheur, spécialiste de géopolitique environnementale et de gouvernance des migrations à l’Université de Liège, Il participe également au GIEC et donne des conférences sur le changement climatique et les politiques migratoires dans différentes universités, dont Sciences Po et l’Université de la Sorbonne à Paris.

Note de Flint : le schéma proposé par François Gemenne ne prend pas en compte les « émissions importées » (par exemple les produits achetés en Europe et produits en Chine ou en Inde). L’auteur le reconnait : « Non, en effet – à ma connaissance il n’y a pas de base de données harmonisées des émissions importées. Ce qui me semble important dans ce graphique, c’est la trajectoire des différents pays/régions.« 

👉 Pour proposer vos propres sources et données contradictoires, rejoignez la communauté Flint sur Discord (déjà 1000 membres !).