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Quel est l’effet du streaming vidĂ©o sur l’environnement ?

Quel est l’effet du streaming vidĂ©o sur l’environnement ?

Tu te souviens, il y a quelques jours, lorsque nous te parlions des dĂ©gĂąts environnementaux de ta boĂźte mail ? En rĂ©alitĂ©, tous nos outils numĂ©riques polluent. Et chez Flint, on aime bien rĂ©flĂ©chir Ă  l’impact environnemental de nos activitĂ©s du quotidien, pour ne pas rester dans l’illusion que nos outils numĂ©riques sont uniquement dĂ©matĂ©rialisĂ©s. Aujourd’hui je me penche sur le cas du streaming vidĂ©o : qui aurait cru que sous un plaid, dans nos canapĂ©s, devant une sĂ©rie Netflix, on pollue quand mĂȘme la planĂšte ? Sur ce sujet, tu vas voir, on a droit Ă  une bataille de chiffres. Mais il est intĂ©ressant d’avoir un panorama des arguments en prĂ©sence pour se faire sa propre idĂ©e.

💡 Pourquoi c’est intĂ©ressant ? Comprendre l’origine de la pollution numĂ©rique permet de nous sensibiliser Ă  l’impact environnemental de nos outils du quotidien et d’en envisager de nouveaux usages. 

Les faits : 

đŸ’» Les Français et le streaming

– Selon une Ă©tude du CSA et d’Hadopi, au printemps 2020, 46% des internautes français avaient accĂšs Ă  un service de vidĂ©o Ă  la demande par abonnement (VĂ DA : Netflix, Disney+, Prime Video, Salto, MyCanal, etc – Clubic) et 21% Ă  une offre de tĂ©lĂ©vision payante. En 2020, 8,3 millions de Français ont utilisĂ© quotidiennement un service de VĂ DA, contre 4,5 millions en 2019. 

– YouTube, qui est Ă©galement une plateforme de streaming vidĂ©o, rassemble, en France, 46 millions de visiteurs uniques chaque mois (Oberlo). 

🏭 Comment le streaming peut-il polluer

– Selon Greenpeace, le streaming vidĂ©o reprĂ©sente 60% des flux de donnĂ©es sur internet dans le monde. Chaque vidĂ©o en ligne, que ce soit sur YouTube, sur les plateformes de vidĂ©o Ă  la demande ou sur des sites pornographiques, nĂ©cessite le stockage de donnĂ©es dans des data centers, responsable d’une pollution croissante (que nous expliquions ici). Plus la qualitĂ© avec laquelle la vidĂ©o est visionnĂ©e est Ă©levĂ©e, plus les donnĂ©es stockĂ©es augmentent et donc, plus d’énergie est nĂ©cessaire (par exemple, l’ultra-HD nĂ©cessite dix fois plus de donnĂ©es que la HD, Courrier International). 

– Depuis fin 2020, le service VoD MyCanal indique les Ă©conomies d’émissions de CO2 rĂ©alisĂ©es en fonction de la qualitĂ© vidĂ©o choisie (Julien Lausson, journaliste Ă  Numerama, sur Twitter). 

🔎 Combien le streaming pollue ? C’est lĂ  qu’il y a oppositions. 

– En 2019, un rapport du groupe de recherche français The Shift Project Ă©value Ă  306 millions de tonnes de CO2 les Ă©missions de gaz Ă  effet de serre gĂ©nĂ©rĂ©es dans le monde par la vidĂ©o en ligne en 2018 (service de vidĂ©o Ă  la demande (VoD), sites pornographiques, plateformes de vidĂ©os type YouTube ou Dailymotion, vidĂ©os hĂ©bergĂ©es sur les rĂ©seaux sociaux ou sites web). Ça reprĂ©sente 1% des Ă©missions mondiales, plus que les Ă©missions annuelles de la France ou l’Espagne en 2020 (Our World in Data). Les plateformes de VoD reprĂ©sentent un tiers de ces Ă©missions. Un autre chiffre est avancĂ© par l’organisation : le streaming coĂ»terait 3,2 kilogrammes d’eqCO2 par heure. À titre de comparaison, un kilomĂštre en voiture reprĂ©sente 100g Ă  150g d’eqCO2 par passager, en avion c’est 145 Ă  285g d’eqCO2 par passager par kilomĂštre (Greenly). 

– En juin 2020, l’analyste numĂ©rique/Ă©nergie de l’International Energy Agency (IEA) George Kamiya contredit les calculs du Shift Project (IEA, CarbonBrief), en relevant plusieurs erreurs, dont l’une concerne la rĂ©partition de visionnage de Netflix, selon le support (qui influe sur les Ă©missions carbone). Pour lui, le streaming sur Netflix ne s’effectue qu’à 5% sur tĂ©lĂ©phone, et non Ă  50% comme le chiffre le Shift Project. Mais l’expert se trompe dans sa lecture du graphique dĂ©voilĂ© par Netflix (Recode) : en 2018, Ă  son inscription, un utilisateur regardait Netflix Ă  30% sur son tĂ©lĂ©phone. 6 mois aprĂšs, ce n’était plus qu’à 10% (Georges Kamiya a simplement inversĂ© les chiffres concernant les smartphones et les tablettes).

– The Shift Project a par la suite publiĂ© un article de suivi pour revoir Ă  la baisse son estimations Ă  la baisse, Ă  400 grammes d’eqCO2 par heure. L’IEA a rĂ©alisĂ© sa propre estimation, Ă  36 grammes d’eqC02 par heure.

– ProblĂšme, l’estimation de 305 millions de tonnes de CO2 par an du Shift Project reste reprise par de nombreux mĂ©dias : New-York Post, CBC, pure mĂ©dias. 

– Selon Emma Stewart, directrice du dĂ©veloppement de Netflix, en 2020, regarder une heure de vidĂ©o en streaming Ă©met en moyenne 100 grammes d’éqCO2, soit l’Ă©quivalent de 400 mĂštres parcourus en voiture Ă  essence (Le Parisien). La plateforme prĂ©cise que ce calcul a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© par les algorithmes du logiciel DIMPACT (dĂ©veloppĂ© par l’UniversitĂ© de Bristol), dĂ©jĂ  utilisĂ© par la BBC ou d’autres chaĂźnes privĂ©es anglaises pour calculer leur empreinte Ă©nergĂ©tique (Le Point). 

– En 2020, le ministĂšre allemand de l’Environnement, l’Agence fĂ©dĂ©rale pour l’environnement, en collaboration avec l’Ökoinstitut et la Fraunhofer-Gesellschaft, ont publiĂ© une Ă©tude, dont les rĂ©sultats ont Ă©tĂ© repris par la SĂŒddeutsche Zeitung : une heure de vidĂ©o via les services de fibre optique Ă©met 2 grammes d’eqCO2. L’empreinte double en VDSL (connexion haut dĂ©bit via un cĂąble en cuivre), et augmente fortement lorsqu’un rĂ©seau mobile est utilisĂ© : 5 grammes de CO2 par heure en 5G, 13 grammes en 4G et 90 grammes en 3G. 

– Selon les chiffres du service MyCanal, repris par Numerama, en qualitĂ© maximale (1080p/4K), une heure de vidĂ©o visionnĂ©e sur ordinateur reprĂ©sente 42 Ă  43 grammes d’éqCO2.

– Selon les estimations de Carbon Trust, entreprise qui accompagne les autres dans leur dĂ©carbonisation, une heure de vidĂ©o en streaming, en Europe, reprĂ©sente environ 55 grammes d’eqCO2

❓ Que faut-il en conclure ? 

– Il ne semble pas y avoir de consensus sur une donnĂ©e prĂ©cise, chaque entreprise y allant de son estimation. Mais le streaming vidĂ©o pollue, plus ou moins selon le type de rĂ©seau utilisĂ© et la qualitĂ© de vidĂ©o choisie. Le bon digital livre quelques conseils sur lesquels chacun peut agir pour limiter la pollution de ses visionnages : rĂ©duire la qualitĂ© dĂšs que possible, limiter le temps de streaming ou le nombre de vidĂ©os grĂące Ă  diffĂ©rents outils, utiliser un rĂ©seau wifi plutĂŽt qu’un rĂ©seau mobile, etc.

– En plus de corriger les calculs du Shift Project, certains spĂ©cialistes comme l’ingĂ©nieur en informatique Pierre Beyssac (cofondateur du service d’hĂ©bergement Gandi.net et porte-parole du parti Pirate) questionnent les fondements mĂȘmes du dĂ©bat. En substance, la question qu’il dĂ©veloppe dans cet article de blog est la suivante : promouvoir la sobriĂ©tĂ© numĂ©rique, c’est bien. Mais faut-il le faire en mettant l’accent sur la consommation Ă©nergĂ©tique de nos usages numĂ©riques, alors que l’Ă©lectricitĂ© française est l’une des moins carbonĂ©e au monde ? Ou plutĂŽt se pencher sur les coĂ»ts de la fabrication de nos ordinateurs, smartphones ou tablettes, que nous sommes parfois prompts Ă  Ă©changer contre de nouveaux modĂšles alors mĂȘme qu’ils fonctionnent encore ?

Pour complĂ©ter ou corriger cet article et apporter vos sources, 📝 rendez-vous sur sa version participative ou venez 💬 en discuter avec nous sur Discord. 

[modification 2 janvier 2022 : ajout de la piste soulevée par Pierre Beyssac]

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