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Les Français détestent-ils l’information ?

Les Français détestent-ils l’information ?

En bref :

Pour le lancement de sa nouvelle offre hier matin, Flint a commandé à l’IFOP un sondage sur le regard que portent les Français sur les médias et l’information. Parmi les résultats, 91% des personnes interrogées déclarent avoir le sentiment qu’“il n’est plus possible de débattre sans que cela ne tourne au dialogue de sourd, voire à l’affrontement”. Par ailleurs, 55% d’entre elles éprouvent de la méfiance, 18% de la colère et 17% du dégoût à l’idée des médias et de l’information, devant les émotions plus positives que sont l’intérêt (16%) et la curiosité (15%). Ces sentiments sont partagés par toutes les classes d’âge, toutes les catégories socioprofessionnelles et toutes les opinions politiques. 

🗒️  À emporter : derrière les résultats de cette étude se posent des questions de traitement de l’actualité, de surexposition des citoyens à un flux continu d’information et de difficultés à la trier. 

Les faits : 

🧐 Le sondage

– L’étude que Flint a commandée est un sondage mené par questionnaire auto-administré en ligne sur un panel de 1011 personnes sélectionnées selon la méthode des quotas. 

– La validité des sondages étant débattue, en particulier en période électorale, les deux grands instituts français Ifop et Ipsos détaillent ici et leurs manières de travailler, notamment en ligne. 

– Cette revue de littérature scientifique souligne la facilité de mise en œuvre comme avantage principal des sondages, et les difficultés d’échantillonnage comme désavantages. 

🧮 Les résultats

– Facteurs potentiellement explicatifs des sentiments des Français face à l’information, 89% des interrogés estiment voir toujours passer les mêmes informations, 82% que celles-ci sont souvent inutiles, 73% se déclarent submergés et 67% doutent de la véracité de l’information qu’ils reçoivent, y compris si elle est diffusée par un média reconnu. 

🗞️ Qualité de l’information ? 

– Les médias sont accusés de beaucoup de maux, notamment de déformer la réalité. En effet, la couverture de la vie en banlieue n’est pas toujours nuancée, la crise des Gilets jaunes a été difficile à considérer, et la diversité (de genre,d’origines sociales, ethniques, d’orientation sexuelle, etc) de la société n’est pas toujours bien représentée. Si la critique des médias a longtemps été l’apanage de la gauche et de l’extrême-gauche, droite et extrême-droite en redoublent aussi depuis une dizaine d’années

– Les réseaux sociaux, notamment Twitter, sont aussi accusés de détériorer les possibilités de débat. Dans Le Monde, le journaliste Nicolas Truong argumente qu’associés à l’avènement des éditorialistes dans les médias écrits ou télévisuels, nous nous transformons en société du commentaire plutôt que de l’information pure. 

– Les médias restent un outil démocratique car ils exposent, rapportent, révèlent l’information. Celle-ci est un bien public, qui permet le débat informé au sein de nos sociétés. C’est pourquoi une organisation de coordination internationale de rédactions comme l’ICIJ a par exemple été nominée au Prix Nobel de la Paix cette année : pour avoir apporté plus de transparence sur les flux mondiaux de blanchiment d’argent.

📺 Uniformité de l’information ? 

– L’INA a passé en revue plus de 8 000 heures de programme sur les chaînes d’information en continu et 400 sur les canaux historiques. Elle a constaté que le Covid avait pris 75% du temps d’antenne en mars 2020, et la moitié des sujets de journaux télévisés sur l’année

– En 2017, déjà, un algorithme de l’INA montrait que 64% des informations publiées en ligne correspondaient à des copier-coller bruts de dépêches AFP. Et lorsque la presse est réellement écrite, celle-ci est ensuite fréquemment plagiée par la radio ou la télé

– La majorité des médias traditionnels appartiennent à une poignée d’intérêts industriels, financiers ou à l’État – mais plein de plus petits revendiquent leur indépendance.

🏝️ Éloignement de l’information ?

– En 2018, Eric Scherer, directeur de la prospective à FranceInfo, se posait la question d’un monde post-news, où les citoyens ne s’informeraient plus. Il mentionnait les 70% d’Américains exprimant une newsfatigue, une lassitude de l’information. 

– Les Français sont de ceux qui lisent le moins la presse quotidienne dans le monde et qui sont le moins prêts à payer pour une information sûre, selon l’étude Global Advisor 2020. 

– En mars 2021, une étude de la Fondation Descartes a montré que les Français passent en moyenne 3% de leur temps en ligne à s’informer. Surtout, près de 1 sur 5 n’avaient pas consulté un seul site d’information sur les 30 jours de l’enquête. 

🍀 Des solutions pour mieux s’informer ?

– À ses débuts, internet a souvent été présenté comme un potentiel outil démocratique, une agora numérique où tout le monde pourrait échanger. Or, si le clash semble se normaliser, il reste des lieux où le débat est possible, peut-être parce qu’il y est cadré – sur letter.wiki, chez Parlia, sur certains subreddit ou dans les pages de discussion de Wikipédia par exemple.

– Les usages numériques ont permis la modernisation d’anciennes pratiques d’information, avec les podcasts ou les newsletters (👋). Souvent plus spécialisés en fonction d’intérêts précis, ces formats permettent le temps long et la réflexion.

– Contrairement aux logiques de chambres d’écho souvent mises sur le dos des algorithmes des réseaux sociaux, l’étude de la Fondation Descartes infirme l’idée que les Français ne s’informent que de manière politiquement orientée.

– Dans un sondage Poll&Roll pour b/wsociety, 90% des Français interrogés se déclarent favorables à la mise en place d’une formation dans le secondaire pour sensibiliser élèves et étudiants à la question de la fiabilité de l’information. 87% se déclarent favorables à la suppression d’articles lorsqu’il est avéré que ceux-ci véhiculent une information fausse. 

– Le Digital News Report du Reuters Institute montre que la pandémie a rappelé l’intérêt de l’information traditionnelle, augmentant sa consommation. On y lit aussi que les personnalités auxquelles le grand public fait le plus confiance (à 83%) sont les scientifiques, suivis de près par les organisations nationales puis internationales. 

– D’ailleurs, dans une logique similaire, 83% des personnes interrogées par l’Ifop pour Flint déclarent vouloir connaître les sources des informations qu’elles consultent pour pouvoir vérifier par elles-mêmes. Ça tombe bien, c’est dans cette logique qu’on essaie de vous renvoyer vers un maximum de sources primaires dans les newskits : pour que vous puissiez vérifier et vous faire votre propre avis 🙂

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[ajout 25 juin 2021 : ce lien vers des initiatives pour débattre sans se battre]